Présentation
Depuis bientôt quatre siècles, d’une œuvre l’autre et de femme en femme, Don Juan traverse le vaste champ du désir, incarnant à la fois l’impiété libertine et la séduction au masculin. Il n’est pas certain toutefois que revienne à ces deux invariants du mythe le mérite de nourrir l’imagination des écrivains, de stimuler la sagacité des commentateurs et de provoquer la fascination du public. En 1853, dans l’ébauche d’un drame intitulé La Fin de Don Juan, Baudelaire écrivait : « Car ce n’est pas la qualité des objets qui fait la jouissance, mais l’énergie de l’appétit ». C’est dans la perspective ouverte par cette remarque du poète que le présent essai entend s’inscrire. S’appliquant à rendre compte de l’appétit de l’ogre, il s’efforce également à en déceler le système pulsionnel sous-jacent. Peu d’auteurs ont méconnu l’oralité de Don Juan. Encore fallait-il en systématiser l’étude afin, ce faisant, de désigner celle-ci comme véritable moteur du mythe.