Présentation
© Photographié par Jean-David Moreau.
« J’ai grandi dans un pur vide culturel, dans une absence totale de repère pour l’esprit ». Marcel Moreau est né le 16 avril 1933 à Boussu, village minier du Borinage, en Belgique. Fils d’ouvrier, il interrompt ses études en 1948 pour travailler dans la robinetterie. Il gagne sa vie comme aide-comptable au journal Le Peuple à Bruxelles, puis entre, en 1955, comme correcteur au journal Le Soir. Premières velléités d’écrivain. Premiers « états de possession »… Il se marie en 1957 et aura deux enfants. En 1968, s’installe à Paris où il exerce son métier de correcteur (Alpha Encyclopédie, Le Parisien Libéré, en 1971, Le Figaro, jusqu’en 1989). Nombreux voyages en Inde, Iran, Népal, Cameroun, Pérou, Mexique, U.R.S.S., Chine, Etats-Unis, Canada. Naufrage (100 morts) en Adriatique, au retour d’un séjour en Grèce. Rencontres avec Paulhan, Anaïs Nin, Dubuffet. Correspondance importante avec ces deux derniers. Une longue amitié avec Topor. Des prix littéraires en Belgique, et un au Canada.
Depuis son premier écrit en 1963, il conçoit une oeuvre en marge et exigeante.
Marcel Moreau puise sa matière poétique dans les tréfonds de son être. C’est en ouvrant béante la chair qui le constitue, en s’aventurant toujours plus près de l’extrême limite comme happé par une chute inévitable et en forant sans relâche de souterraines galeries, qu’il extrait le minerai fondamental de son œuvre. Torturée, rebelle et baroque, à mi-chemin entre Artaud et Rabelais, son écriture ne doit rien, ni aux usages, ni aux modes. Elle est, comme le souligne le philosophe Michel Onfray, « d’une superbe sauvagerie, d’une belle élégance ».
(...) Pour la première fois, je perçois l’écriture comme une drogue, quelque chose (comme vous me l’avez écrit une fois) à boire et à consommer. C’est écrit avec le corps, les nerfs et le sang et j’oserais dire qu’un tel mélange est presque plus que ce qu’un être humain peut supporter. Si vous, vous sentez que j’ai habité les profondeurs, moi je pense que vous avez traduit en mots des sensations et des expériences que je croyais indescriptibles. En un sens, il s’agit de la métamorphose de la chair en mots, ou des mots en chair. C’est un prodige...
– Anaïs Nin, fragment de lettre à Marcel Moreau (1972)
Décapée des fausses convenances, l’inspiration restitue le frémissement de la sensualité, calligraphie la jouissance avec une mémoire sans faille.
– Anne Pons (Le Point)
Dans la catégorie des possédés du verbe, Marcel Moreau occupe depuis plus de quarante ans la place de l’accidenté miraculeux.
(…)Éblouissement, résurrection, hymne, sacralisation ravivée de la femme, sans que soient passés pourtant par pertes et profits les éclairs noirs et lucides qui peu à peu ravagent.
– André Velter (Le Monde)
Bibliographie
Cinquante ouvrages publiés, dont :
– Quintes, Buchet-Chastel, 1963 (extraits réédités dans Incandescences)
– Bannière de bave, Gallimard, 1963
– Julie ou la dissolution, C. Bourgois, 1971
– Les Arts viscéraux, C. Bourgois, 1975
– Sacre de la femme, C. Bourgois, 1977
– Discours contre les entraves, C. Bourgois, 1979
– Kamalalam, L’Âge d’homme, 1982
– Bal dans la tête, La Différence, 1995
– La Compagnie des femmes, Lettres Vives, 1996
– Extase pour une infante roumaine, Lettres Vives, 1998
– La Vie de Jéju, Actes Sud, 1998.
– Féminaire, Lettres Vives, 2000
– Lecture irrationnelle de la vie, Complexe, 2001
– Orgambide, Scènes de la vie perdante, Lettre Vives, 2002
– Corpus Scripti, Denöel, 2002
– Morale des épicentres, Denöel, 2004
– Adoration de Nona, Lettres Vives, 2004
– Nous, amants au bonheur ne croyant…, Denoël, 2005
– Le Chant des paroxysmes, suivi de La Nukaï, réédition, VLB Editeur, Québec, 2005
– Quintes, L’Ivre livre, Sacre de la femme, Discours contre les entraves, réédition, Denoël, collection « Des heures durant… », 2005
– Souvenirs d’immensité avec troubles de la vision, Éditions Arfuyen, 2007, publié à l’occasion de la remise du Prix de littérature francophone Jean Arp 2006
– Insolations de nuit, lithographies de Pierre Alechinsky, La Pierre d’Alun, 2007
– Une philosophie à coups de rein, Denoël, 2008
– Des hallalis dans les alléluias, Denoël, 2009
– La Violencelliste, Denoël, 2011
– Un cratère à cordes, Les évadés du Poème 2, 2013 ; rééd. Lettres vives, 2016
– De l’Art Brut aux Beaux-Arts convulsifs, correspondance Jean Dubuffet / Marcel Moreau, L’atelier contemporain, 2014
– À dos de Dieu, Quidam, coll. « Les indociles », 2018